« On veut être les pionniers d’une nouvelle cuisine française à New York. Renouveler le genre et marquer l’histoire de la gastronomie française. » Quand elle parle de son projet, Alexia Duchêne ne fait pas dans la fausse modestie. La jeune femme, à peine 29 ans, assume ses ambitions. Leurs ambitions. « On », c’est elle et son mari, Ronan Le May. Elle en cuisine, lui en salle et en charge de la carte des vins. Tous les deux s’apprêtent à ouvrir Le Chêne au cœur de West Village, un restaurant bien ancré dans ses intentions gauloises mais loin des clichés sur notre gastronomie que projettent les Américains.

« L’idée c’est d’être haut de gamme sans être prétentieux. Didactique sans être ennuyeux » explique-t-elle. Le réconfort avec la précision, le classicisme mais certainement pas au détriment de la fantaisie. Voilà l’axe culinaire suivi par cette surdouée de la cuisine, remarquée lors de la saison 10 de Top Chef et passée par de nombreuses tables prestigieuses depuis 14 ans qu’elle exerce (résidences à Londres, Paris, Copenhague, Arles, au Taillevent puis chez Passerini).

Et si, à l’époque où nous l’avons rencontrée, elle n’avait pas encore finalisé le menu, on peut déjà vous révéler quelques ébauches de recettes. « Je pense à un pithiviers cochon et anguille fumée, un foie gras lucullus avec un condiment arbousiers, des quenelles de bar sauce champagne et réduction de persil… Mais il y aura des choses aussi simples que des frites, car il n’y a rien qui accompagne mieux une viande. Et des classiques américains revisités pour faire un pont entre les deux cultures. »

Un melting-pot à l’image de New York

Pour l’ouverture de son premier établissement en tant que propriétaire et exploitante (on l’avait déjà rencontrée à l’occasion d’un autre projet à Brooklyn), Alexia Duchêne n’a rien laissé au hasard. Du choix du parquet en passant par les tissus, de l’argenterie qu’elle est allée chiner en France et dans les anciennes collections de Christofle et Bernardaud jusqu’à l’ambiance musicale, tout a été pensé par elle et son mari et soumis à son goût rigoureux. Un an et demi que le couple y consacre 100% de son énergie pour une ouverture prévue mi-mai.

Pendant la visite du chantier, la jeune cheffe s’anime, nous décrit sa cuisine semi-ouverte « pour garder un peu d’intimité », pointe du doigt un espace qu’elle veut séparer du reste de la salle par un lourd rideau et du sol en moquette « pour des dégustations de vins par exemple ou des réservations de groupe », délimite l’espace bar qui ravira les amateurs de cocktails et les curieux de passage. On s’y voit déjà !

L’eau à la bouche et du beau à la louche, telle semble être la formule gagnante choisie pour déclencher l’émotion chez ses clients, qu’Alexia imagine de tous horizons. « Des Français mais pas que. Des jeunes et des gens plus aisés. Comme New York, je vois ce restaurant comme un melting-pot. Les prix seront maîtrisés car je ne cherche pas l’exclusivité dans ma clientèle. Au contraire ! Et c’est aussi pour cette raison que West Village est le quartier parfait » explique la cheffe.

S’enraciner dans le quartier et s’étendre

Quant au nom de l’établissement, il s’est imposé assez facilement, inspiré par son patronyme et la symbolique puissante de l’arbre. « Ce nom, ce sont les valeurs qui nous animent au quotidien : stabilité, longévité. Avancer doucement et s’enraciner dans le quartier ». Et s’étendre pourquoi pas. « Je ne veux pas m’arrêter là. Ici, ce sera comme le flagship. L’idée, c’est d’établir un ADN, un style. Et décliner l’amour des bons produits avec une boulangerie-pâtisserie, un bar à vins, de la street-food aussi. »

Avec Le Chêne, Alexia Duchêne rêve d’une success story à l’américaine, inspirée par ses pairs, Daniel Boulud ou Jean-George Vongerichten. « Je vais donner mes cinq prochaines années corps et âme à ce restaurant » promet-elle. Aux cuisiniers doués, la valeur n’attend point le nombre des années…

Le Chêne, 76 Carmine Street, West Village. Ouverture prévue en mai.