Elle Decor (la version américaine du Elle Décoration français) tient tout le week-end une boutique temporaire d’ameublement et de décoration, dont les bénéfices des ventes des billets ($30 l’entrée) seront reversés à Housing Works. On y retrouvera tous les designers et les marques croisés au détour des pages du magazine, comme les fameuses chaises “Parisienne” de Calligaris (photo) à $242 l’une (au lieu de $294) ou les lanternes en fonte Restoration Hardware proposées entre $47 et $239 (au lieu de $59–$299)
Jusqu’au lundi 30 mai
540 W 28th St entre Tenth et Eleventh Aves (212-767-5883)
Chez Superdry, le Abercrombie anglais, les filles pourront s’offrir une chemise à carreaux ($64 au lieu de $92) ou une robe imprimée d’inspiration vintage ($81 au lieu de $115), tandis que les garçons craqueront pour les shorts de surf hawaïen ($49 au lieu de $70) et les tennis en toile ($42 au lieu de $60).
Jusqu’au lundi 30 mai
718 Broadway et Washington Pl (646-602-9195)
En ce moment, la marque britannique French Connection organise aussi des sample sales. Du côté de la collection femme, on trouvera des robes imprimées étiquetées à $120 (au lieu de $178) et des blouses à volants à $90 (au lieu de $128). Du côté des hommes, les manteaux seront à $150 (au lieu de $198) et les chemisettes à carreaux à $50 (au lieu de $68).
Jusqu’au mardi 31 mai
700 Broadway et 4th St. (212-473-4486) / 435 West Broadway et Prince St (212-219-1197)
Chez Thread Social, les petites robes et tenues estivales seront jusqu’à moitié prix, mais seulement mercredi ! La combinaison fleurie passe de $365 à $150, la robe blanche brodée de $650 à $425 et la robe de cocktail en soie de $495 à $225.
Mercredi 1er juin
26 W 17th St entre Fifth et Sixth Aves, suite 301 (212-414-8844)
Si vous êtes fan des accoutrements extravagants de Lady Gaga, Madonna ou Katy Perry, une escale chez Noir Jewelry s’impose. Leur fournisseur officiel de bijoux cassent les prix : le colliers coloré passe de $220 à $75, la bague pyramidale 18 carats de $80 à $45 et les boucles d’oreilles géométriques en résine passent de $75 à $10.
Du mercredi 1er au vendredi 3 juin
350 W 38th St entre Eighth et Ninth Aves, 5e étage (212-244-4846)
Prêt-à-porter Iro et Paul & Joe Sister, maroquinerie Great by Sandie… Le moins qu’on puisse dire c’est que les marques françaises seront au rendez-vous (et surtout affichées jusqu’à moins 70%) à cette vente spéciale qui aura lieu la semaine prochaine dans Noho. On y trouvera aussi des chaussures signées Coclico, Chie Mihara et Argila.
Jeudi 2 et vendredi 3 juin
670 Broadway et Bond St., suite. 502 (212-965-5460)
Elle Decor, French Connection et Superdry
Le Simonet de Richaud Valls
Tout commence à Paris aux côtés de ce qu’il appelle « la famille », Romane (son ex compagne) et Richard Bohringer : « Ils m’ont beaucoup apporté, nous sommes très proches. Ce sont des personnes qui m’ont fait du bien ». Pendant près de 10 ans, Richaud enchaîne tournages de séries télévisées et films tel que Avril, dans lequel il décrochera un des rôles principaux. Cependant, « après 10 ans dans ce milieu, la morosité parisienne m’a lassé, j’avais l’impression d’avoir fait le tour, j’avais besoin d’une meilleure énergie… ».
C’est en grande partie cette envie d’ailleurs qui amène Richaud Valls à New York. Première idée: retracer avec humour l’histoire de tous les artistes qui cherchent à percer dans le milieu très sollicité du 7ème art et de la musique à New York. C’est ainsi que va naître la série Tease, aujourd’hui en négociation au MIP à Cannes : « Je voulais faire des portraits d’américains et de francophones du Lower East Side. Ce quartier m’inspirait pour tout : son esthétique et sa population d’artistes qui vivent dans des situations parfois précaires ».
C’est ensuite grâce au succès de La Dame aux Camélias, pièce dans laquelle il jouera, que Richaud continue à écrire et s’entoure de plus en plus d’acteurs francophones et américains. Motivé et déterminé il décide de monter sa propre société de production, en collaboration avec d’autres artistes : Simonet Productions, qui, vous l’aurez compris est une société qui a du chien.
La vie de Richaud à New York est aussi rythmée par des rencontres déterminantes. Sans doute grâce à sa personnalité accessible mais aussi parce que Richaud à l’œil pour repérer les perles rares. Dans ses nombreuses découvertes, Sophia Urista, jeune chanteuse de 26 ans qui vient de signer avec Quincy Jones, fera l’objet d’une série documentaire consacrée à sa musique et sa carrière. Son flair, il le mettra au service des autres, et s’érige alors en coach pour jeunes talents : « J’aime partager mon expérience. Etant comédien, c’est plus facile de comprendre les attentes de chacun, être terre à terre et rester simple. »
Et après ? « Etendre Simonet Productions, renforcer le poids de la communauté artistique francophone en remplissant les salles et faire un long métrage ». Des projets ambitieux qui demandent de l’investissement et une équipe solide qu’il va composer avec de bons copains, des artistes aussi déjantés et motivés que lui. Avec la passion de Richaud comme moteur, Simonet Productions, c’est le début d’une belle aventure. Et pour avoir un avant goût du talent de cette équipe, Richaud mettra en scène une pièce de Carole Fréchette, Jean et Béatrice, qui sera interprétée en anglais et en français par Sofi Lambert, Hélène Kuhn, Max Van Bel et Jean Brassard. Rendez-vous donc sur les planches du 6 au 12 juin au Theater for the New City.
Le dernier Jean-Luc Godard au James Bridges Theatre
Jean-Luc Godard a souhaité présenter son point de vue sur l’Europe et le monde en 2010 à travers le prisme d’un voyage autour de la Mer Méditerranée, passant par l’Egypte, la Palestine, La Grèce, Naples ou encore Barcelone. Le film, documentaire politique, fut sélectionné au Festival de Cannes en 2010 dans la catégorie Un Certain Regard.
Quand ? Jeudi 26 mai 2011, à 19h30
Où ? Au James Bridges Theatre, 1409 Melnitz Hall, UCLA Campus, Westwood.
Combien ? Gratuit.
Nicolas Bouvier, l'écrivain voyageur
Peu connu en France, Nicolas Bouvier est pourtant considéré comme une figure incontournable de la littérature du voyage au XXe siècle. Dès son plus jeune âge il se met à parcourir le monde et s’inspire de ses périples dans ses romans. En 1953, il abandonne ses études à l’Université de Genève pour rejoindre son ami Thierry Vernet. Leur voyage en Fiat 500 à travers le Yougoslavie, la Turquie, l’Iran, l’Afghanistan et le Pakistan donnera L’Usage du monde (1963). Suivront Chronique japonaise (1975), Le poisson-scorpion (1982), inspiré de son séjour au Sri Lanka, ou encore Journal d’Aran et d’autres lieux (1990). Photographe et iconographe, il faisait aussi partie des membres fondateurs du Groupe d’Olten, une association d’écrivains suisses.
Mercredi soir, Jean-Claude Carron présentera la vie et le travail de l’auteur. Professeur de français, spécialiste de la Renaissance et de la poésie, il travaille en ce moment sur l’imitation poétique et le dialogue philosophique comme genres littéraires. Il a notamment publié Discours de l’errance amoureuse: Une lecture du ‘canzoniere’ de Pontus de Tyard (1986), François Rabelais: Critical Assessments (1995) ainsi que de nombreux articles sur l’histoire des idées, Mallarmé, Montaigne..
Trois actrices suisses liront en français des extraits des écrits de Nicolas Bouvier. La conférence sera suivie d’un apéritif.
Où ? Alliance Française de Los Angeles ,10390 Santa Monica Blvd, Suite 120, Los Angeles, CA 90025
Quand ? Mercredi 1er juin à 19h30
Combien ? Gratuit. Donations bienvenues.
RSVP à [email protected] ou à [email protected]
Faites dédicacer votre "Feast at the Beach"
William Widmaier, sans doute le plus francophile de tous les Californiens, viendra dédicacer A Feast at the Beach.
Paru l’été dernier, son roman mêle anecdotes nostalgiques du Saint-Tropez des années 60 et recettes de cuisine typiquement provençales, le tout inspiré de ses vacances chez ses grands-parents au cours desquelles il est tombé amoureux de la France.
Et pour coller à la devise, de l’auteur « Mangez lentement, riez, et savourez la belle vie », des spécialités provençales et du rosé seront servis !
Cliquez ici pour consulter notre critique publiée à la parution du livre
Où ? Alliance Française de Los Angeles ,10390 Santa Monica Blvd, Suite 120, Los Angeles, CA 90025
Quand ? Jeudi 26 mai à 19h
Combien ? Gratuit. Donations bienvenues
RSVP à [email protected]
Musique médiévale française à Riverside
La musique des années 1250 à 1550 est bien particulière et fit la fierté de la France. Flutes, violons, luths, percussions ou encore clavecins…
Quand ? Vendredi 27 mai 2011, de 20h à 21h30
Où ? A l’Art Building (Lab, ARTS 166), à l’Université de Californie Riverside, 900 University Ave.
Riverside, CA 92521
Combien ? $10, $8 pour les seniors et étudiants, $6 pour les enfants.
Pour le plan précis du bâtiment, cliquez ici.
Pour plus d’informations, appelez Kathy De Atley au 951 827-3245
Hommage au Festival de Cannes par son Président
Le film est réalisé par Gilles Jacob, Président du Festival de Cannes. C’est donc un expert qui se propose de nous emmener voir les meilleurs moments du Festival de Cannes mais aussi des entretiens avec les meilleurs réalisateurs nous expliquant leurs secrets de fabrication. Une occasion unique de pénétrer dans l’univers du cinéma.
Le soir de la projection du film Au cœur du Festival sera aussi l’occasion de discuter du Festival de Cannes de cette année tout profitant d’un repas et d’un verre de vin.
Quand ? Mardi 31 mai 2011, à 18h30
Où ? Au restaurant Pistache, 101 N. Clematis, West Palm Beach.
Combien ? Gratuit, mais ne comprend pas le repas. 15% offert pour les membres de l’Alliance Française.
Viernes Culturales à Miami
Tous les derniers vendredis du mois, les artistes se retrouvent au même endroit. Lorsqu’un tel rassemblement à lieu, cela donne un élan artistique profond et sincère et une ambiance bon enfant.
Quand ? Vendredi 27 mai, de 18h30 à 23h.
Où ? Le long de la Calle Ocho (S.W. 8th Street) entre la 14th et la 17th Avenues), dans Little Havana, Miami
Combien ? Gratuit.
Le monde sous-marin en images
Vendredi et samedi, le Miami Science Museum projètera une sélection de films primés au Festival mondial de l’image sous-marine. Ce festival français, dont la 38e édition se tiendra à Marseille en octobre prochain, récompense tous les ans les meilleures productions artistiques, photographiques et cinématographiques liées au monde sous-marin.
Le Miami Underwater Festival comprendra quant à lui un programme francophone : Le Mystère des Requins Baleines (photo) et Naissance d’une Ile, respectivement réalisés par les Français René Heuzey et Bertrand Boyer, seront diffusés samedi matin à 10h30.
En plus des projections, vous pourrez profiter de nombreuses présentations et conférences, d’une exposition photo et d’activités pour les enfants.
Les festivaliers auront aussi l’opportunité de découvrir en exclusivité la toute nouvelle exposition du musée, « Stingray Sting Lab ».
Où ? Miami Science Museum – 3280 South Miami Avenue – Miami, FL 33130
Quand ? Vendredi 27 et samedi 28 mai
Combien ? $8 / $5 pour les enfants et les membres de l’AF. En vente en ligne ici et à l’entrée.
Plus d’infos ici
Lila l’enchanteresse
Début 2002 elle est entrée chez moi, suivie d’un technicien radio. Elle réalisait pour France Culture une série d’entretiens sur le 11 septembre. Sa beauté m’a frappée, et je me suis exclamée: “Que vous êtes belle!” Je n’ai pu m’empêcher d’ajouter, avec l’honnêteté, le manque de tact, ou la rudesse gauloise qui me caractérise: “Dans votre métier de journaliste, c’est un avantage ou un obstacle, d’être si belle?” J’ai terrifié la jeune Lila. Elle me l’avoue presque dix ans plus tard, quand je l’interviewe à mon tour à l’occasion de la sortie de son livre The Enchanter, Nabokov and Happiness. À peine nous retrouvons-nous au restaurant du Crosby Hotel qu’elle me dit: “Tu es très belle, Catherine.” Amabilité qui n’est pas à mettre sur le compte de l’ironie, mais de l’antique politesse orientale.
Lila Azam Zanganeh est née à Paris en 1976 de parents iraniens. Son père appartenait à une grande famille proche des Pahlavi. Son grand-père était officier dans l’armée de l’air. Son père, qui n’avait pas envie d’être militaire, a créé une compagnie de petits avions, Air Taxi, alors que l’Iran se développait dans les années 50 et 60. Son père enfant, dans les années 30, allait avec sa mère à des thés dansants au café de la Mairie où dansaient des femmes portant des jupes au-dessus de genou. Plus tard, grand athlète, il était champion de ski nautique barefoot. Sa mère est allée dans une école catholique, où elle a appris le français. Elle a fait des études de sociologie et d’économie politique en Italie, en Allemagne et en Angleterre. Brillante et polyglotte, elle travaillait au ministère des Affaires étrangères et s’occupait du protocole.
Lila avait trois ans quand sa mère est retournée en Iran pour l’enterrement de sa propre mère. C’est juste à ce moment-là, en février 79, que la révolution islamique a eu lieu. “Rentre vite en France, la situation politique ici est trop instable”, a dit sa soeur à la mère de Lila. Elle est allée à l’aéroport, où s’étaient rassemblés des milliers d’étrangers qui tentaient de partir. Elle pleurait: sa mère venait de mourir et elle risquait de ne pas revoir son mari et sa fille. Elle était très belle. Un employé d’Air France a eu pitié d’elle: il l’a inscrite sur la liste des passagers du dernier avion qui a quitté Téhéran, l’avion d’Air France qui avait ramené Khomeiny dans le pays. Ce soir-même, les frontières ont été fermées. Un oncle de Lila a été exécuté dans les jours qui ont suivi.
Lila a pour sa mère une immense admiration. Sa mère, dit-elle, était extraordinaire de patience. Elle l’a éduquée en deux langues, le français et le persan. Elle lui a appris l’italien, qu’elle parlait sans cesse à la maison. Elle lui a appris l’anglais, quand Lila avait douze ans, en lui montrant Hamlet avec Lawrence Olivier et en lui faisant décortiquer le texte phrase après phrase. Pour sa mère, qui avait perdu en même temps son pays et sa mère, il n’y avait rien de plus important que sa fille et l’éducation de sa fille. Petite, Lila est allée à l’école de quartier, puis à l’école bilingue à partir de la sixième. Elle a grandi dans un milieu de réfugiés politiques iraniens. À l’école, ses camarades remplissaient leur fiche le premier jour en écrivant: “père ingénieur, mère pharmacienne.” Mais les parents de Lila n’avaient ni travail, ni patrie. Tous les soirs il y avait du monde chez elle: des artistes, des intellectuels. Elle n’avait pas de famille en France. Elle a grandi parmi des adultes qui avaient des tonnes d’histoires à raconter, et dans l’imaginaire d’un Iran qui n’existait plus. Sa mère avait un fort lien culturel à l’Europe et à la France. Quand Lila avait douze ans, elle l’a amenée devant le lycée Henri IV et lui a dit: “Tu vois, les enfants intelligents, c’est là qu’ils vont.”
Quand Lila a été acceptée en hypokhâgne à Henri IV, puis quand elle a été reçue à Fontenay-Saint-Cloud trois ans plus tard, elle a réalisé le rêve de sa mère. Elle était émue et reconnaissante, elle l’Iranienne, de se retrouver dans ce temple de l’intelligence et de la rhétorique. Angliciste, elle a fait sa maîtrise sur Lolita, “The Texture of words.”
En 98 elle est partie à Harvard dans un échange avec Normale Sup, et y a enseigné le français et l’espagnol. Elle connaissait déjà les États-Unis où avaient émigré sa grand-mère paternelle et les soeurs de son père, qui habitaient Los Angeles. À Harvard elle a suivi des cours de russe, d’arabe, d’économie, et s’est ensuite inscrite à la School of International Public Affairs à Columbia, pour un Master’s. Entre temps elle a fait un DEA sur Ada, ou l’ardeur, sous la direction de Pierre-Yves Pétillon, professeur à Ulm. Elle a hésité à se lancer dans un doctorat, mais n’aimait pas la rhétorique du travail universitaire. Elle n’avait pas envie d’être prof. Par ailleurs, la khâgne qui l’avait rendue française l’avait aussi inhibée: elle pensait qu’elle n’avait pas de don et ne pouvait pas écrire. À Columbia, elle suivait le cours d’écriture de Judith Christ. L’école américaine a débloqué ce que l’école française avait bloqué. Dans la culture américaine, il y a l’idée que l’écriture est un artisanat et qu’on peut essayer. Judith Christ a ouvert ce que Lila Azam Zanganeh avait verrouillé mentalement à cause de l’idée trop haute qu’elle avait de ce que devait être l’écriture: c’est à New York que le papillon est sorti de sa chrysalide.
Lila, pendant ce temps, travaillait comme journaliste culturelle. Grâce à une rencontre de hasard avec Laure Adler, elle a réalisé un documentaire de deux heures sur les artistes et écrivains à New York au moment du 11 septembre. Elle a fait un stage à la BBC aux Nations Unies. À Moscou en 2001, elle a travaillé pour CNN. En janvier 2002 elle a appelé Le Monde et demandé à parler à Josyane Savigneau: “Je suis normalienne, franco-iranienne, j’habite à New York, j’aimerais écrire pour Le Monde des livres.” Elle a récidivé un peu plus tard en appelant une éditrice du New York Times. Elle essayait de couvrir la littérature américaine pour Le Monde (elle a interviewé John Updike, Gore Vidal, Jonathan Safran Foer, Philip Gourevitch), et la littérature européenne pour l’Amérique. En 2006 et 2008, elle a écrit deux longs portraits pour la Paris Review, de Jorge Semprun et d’Umberto Eco. Ce n’était pas la critique littéraire qui l’intéressait mais le témoignage d’une vie et d’un écrivain sur la cohérence de son oeuvre. En 2004, une éditrice italienne de Norton dont les parents avaient vécu en Iran lui a suggéré de publier quelque chose sur l’Iran. Lila a demandé leur participation à quinze écrivains, intellectuels et artistes de trois générations. Quand le livre a paru chez Beacon Press à Boston en 2006, elle s’est retrouvée dans une position qu’elle ne voulait pas: les journalistes n’avaient pas lu le livre et l’utilisaient pour discuter de politique à une époque où le président Ahmadinejad parlait d‘éradiquer Israël. Au printemps 2006, prise de vertiges intenses, elle a compris qu’elle devait se retirer du jeu et refuser les interviews.
Le livre dont elle avait été l’éditrice lui avait permis d’entrer dans un territoire interdit, celui de l’écriture. L’idée d’un livre sur Nabokov l’a traversée. Pas un livre didactique, pas un livre qui justifierait la moralité de Nabokov écrivain. Un livre sur ce qui l’intéressait depuis sa maîtrise: la texture des mots. Pour elle, Nabokov est un écrivain du bonheur dans la façon dont chaque phrase se déploie et dans la joyeuse sensualité des mots.
Elle a rencontré John Updike qui était d’accord avec sa thèse. Elle a rencontré Dmitri Nabokov, dont elle a trouvé l’adresse email sur un site nabokovien, et qui partageait ses idées. Il lui a paru évident qu’il fallait écrire un livre ludique, gai, léger. Elle a cherché pour ce projet un agent qui soit littéraire, et elle a su convaincre Nicole Aragi, une des plus grandes agentes sur la place de New York, qu’elle a eu le bonheur de rencontrer grâce à une intervention généreuse de Jonathan Safran Foer. Le livre n’aurait jamais abouti sans Nicole Aragi, qui l’a vendu en décembre 2009 à Norton, Penguin, et L’Olivier. Et pourtant ce livre présenté par Salman Rushdie comme “une joyeuse réponse à la joie qui inspiré tout l’art de Nabokov” n’était pas évident commercialement: ni fiction, ni véritable essai, sorte d’hybride comme l’est Lila elle-même, iranienne non iranienne, française non française. Américaine aussi. En 2009 elle a obtenu une carte verte en vertu de son “extraordinary ability.” Une carte verte basée sur le mérite du travail culturel accompli aux États-Unis.
À New York elle a découvert une culture fondamentalement métis, où l’on peut parler la langue que l’on veut, où l’on peut aller au-delà de ses inhibitions en posant la simple question: “Pourquoi pas?” En France, quand elle parle persan avec ses parents, puis passe au français, un français parfait sans une trace d’accent, les gens les regardent en ouvrant de grands yeux. Elle aurait envie de leur dire: “On peut être tout à fait français et tout à fait autre chose. On peut avoir en même temps plusieurs identités.”
Lila poursuit son chemin sur le territoire interdit de l’écriture et travaille maintenant à un roman en anglais. Pour ce premier roman, elle a conçu en toute simplicité, avec une grâce athlétique sans doute héritée de son père, une histoire d’amour qui couvre treize siècles!