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Brèves new-yorkaises : les hôteliers, victimes collatérales de la guerre commerciale de Trump

🏊‍♀️ Après quatre années de travaux, le Davis Center at the Harlem Meer, dans le nord de Central Park, vient d’ouvrir au public. Cet espace, qui remplace l’ancienne Lasker Rink and Pool, offrira des activités tout au long de l’année. Son centre, baptisé « Harlem Oval », évoluera au fil des saisons : patinoire l’hiver, espace vert (en turf) au printemps et à l’automne et piscine en été à partir de juin. Le Davis Center aura coûté 160 millions de dollars. 

🕊 Un groupe de passionnés d’oiseaux à Brooklyn s’inquiète de la disparition de 150 pigeons du Maria Hernandez Park (Brooklyn), soupçonnant qu’ils ont été capturés illégalement pour… des concours de tir en Pennsylvanie.

Ⓜ️ Le Secrétaire américain aux transports a annoncé une coupe des budgets fédéraux pour l’entretien des routes de New York si le péage pour entrer dans Manhattan n’était pas supprimé d’ici le 21 mai prochain. 

💰Bien que contestée par le Real Estate Board of New York (REBNY), la nouvelle loi  (FARE Act), qui exige des propriétaires, et non des locataires, de payer les frais de courtage, entrera en vigueur le 11 juin. Les agents immobiliers et les propriétaires seront condamnés à payer jusqu’à 2 000$ par infraction en cas de frais de courtage illégaux.

👃Greenpoint, Brooklyn a désormais son parfum. Proposé par la marque Bond N°9, il évoquerait la « poire juteuse », la « mousse d’arbre » et le « cardamome frais ». Quoi qu’il en soit, avec son prix de 470 $ la bouteille, le parfum fleure bon la gentrification. 

🇫🇷 Jean-Luc Mélenchon était à New York cette semaine, pour la promo de son livre traduit en anglais, Faites mieux ! Vers la révolution citoyenne (Robert Laffont, 2023). 

🏨 Les hôteliers demandent une réduction de la taxe d’occupation pour compenser la baisse du tourisme attribuée à l’augmentation des droits de douane internationaux imposés par l’administration Trump. Le taux, actuellement à 5,875%, pourrait être réduit à 3% selon la proposition de l’Association des hôtels de New York City.

🏙 L’appartement le plus cher de New York est toujours proposé à la vente dans la tour Steinway. Il s’agit d’un quadruplex (vous non plus vous ne connaissiez pas cette expression ?) dans lequel vous pourrez habiter en vous délestant de 110 millions de dollars. 

⚓️ Un nouveau projet de transport sur l’East River, surnommé « Blue Highway », est en cours de développement à Hunts Point, dans le Bronx. Il vise à réduire le nombre de camions – jusqu’à 1000 par jour – et la pollution, en utilisant des bateaux.

🏊‍♀️ 5,5 millions de dollars, c’est ce que la ville va investir pour donner des cours de natation gratuits à destination de 18 000 élèves new-yorkais. 

📀 Night Owl Video, la seule boutique de location de vidéos – en VHS, DVD et Blu-ray – de New York, ouvre à Williamsburg, comme autrefois !

🐱 L’irrésistible « Hello Kitty Café Truck » fera étape à Flushing, Queens, le samedi 3 mai. Des centaines de fans sont attendus pour faire le plein de gourmandises et de goodies.

🚮 New York, la ville la plus sale des États-Unis ? Mais pas du tout ! La première place est attribuée à Baltimore. Notre belle ville occupe la 17ᵉ place.

😬 Oups ! Les avocats de l’administration Trump ont publié par erreur une note interne détaillant une liste de défauts dans la stratégie juridique du Département des transports américains pour mettre un terme à la congestion.

🚮 Le projet de privatisation du ramassage des ordures a été repoussé à 2027. 

🔥 La qualité de l’air à New York s’est fortement détériorée la semaine dernière à cause des fumées d’un incendie de forêt dans le New Jersey.

✈️ En 2024, une femme d’origine russe était parvenue à embarquer sur un vol New York/Paris sans billet. Voici comment elle a procédé. 

🚁 Après le crash dans l’Hudson River de l’hélicoptère qui a coûté la vie à six personnes le 10 avril dernier, le conseil municipal de NYC a voté pour la limitation des vols d’hélicoptères considérés comme non essentiels. Mais comment allons-nous nous rendre dans nos maisons de Long Island les vendredis soirs ?

🥩 Un projet de loi au Texas propose de renommer le célèbre steak « New York strip » en « Texas strip steak », sous le prétexte que l’essentiel de la viande vient du Texas. Les New-Yorkais sont contre. 

Notre précédente revue de presse évoquait Astoria, une dinde sauvage qui avait quitté son domicile sur Roosevelt Island pour explorer Midtown Manhattan. Las, les habitants de l’île nous ont envoyé des courriers par dizaines pour rétablir la vérité : l’animal s’appelle Rosie (She/Her) et pas Astoria.

Cent jours qui ont ébranlé l’Amérique… et le monde

Il n’aura fallu que cent jours pour que les promesses d’une reprise en main autoritaire se traduisent en actes. Depuis son retour à la Maison-Blanche, le 20 janvier, Donald Trump a engagé une série de mesures visant à restructurer l’appareil d’État selon les lignes d’une droite dure, centralisatrice et favorable à une déréglementation massive. Le Congrès, dominé par une majorité acquise au président, a accompagné cette transformation, tandis que la Cour suprême, à majorité ultra-conservatrice, en a validé les principaux volets, malgré une orientation idéologique plus que contestable.

Ce programme de reprise en main vise à affaiblir les contre-pouvoirs à tous les niveaux : marginalisation du Congrès, tentative de soumission du pouvoir judiciaire, pressions accrues sur les universités, contrôle du contenu pédagogique, attaques contre des médias, intimidations à l’encontre des artistes, chercheurs, ONG – sans oublier les offensives récurrentes contre les minorités raciales, sexuelles et religieuses.

À cette logique de démantèlement institutionnel – illustrée par la fermeture d’agences fédérales, des licenciements massifs et des coupes budgétaires tous azimuts – s’ajoute une attaque frontale contre les droits électoraux : restrictions sévères sur le vote par correspondance, obligation de prouver sa citoyenneté pour rester inscrit sur les listes – dans un pays sans carte d’identité nationale, où récupérer un acte de naissance peut relever du casse-tête administratif -, et redécoupage électoral visant à diluer le poids de certains électorats, notamment dans les bastions démocrates.

Mettre au pas les universités

Toutes ces mesures s’inscrivent dans le cadre du Project 2025, conçu par la Heritage Foundation, think tank ultra conservateur, qui sert de boussole idéologique à cette présidence. Ce projet vise à redéfinir en profondeur les rouages de l’État fédéral, pour mieux les aligner sur une logique autoritaire – tout en préparant, au passage, le terrain pour un éventuel troisième mandat de Trump, au mépris du 22ᵉ amendement.

Mais c’est peut-être dans le champ universitaire que cette volonté d’alignement idéologique s’exerce aujourd’hui avec le plus de brutalité. Le cas le plus emblématique est celui de Harvard. Le 11 avril, l’administration Trump a adressé un ultimatum à l’université : suppression immédiate des programmes DEI (diversité, équité, inclusion), création d’un comité de surveillance approuvé par le gouvernement, et contrôle renforcé sur le recrutement des enseignants comme des étudiants. Harvard ayant refusé ces conditions, la Maison-Blanche a riposté en gelant 2,2 milliards de dollars de financements fédéraux et en menaçant de retirer son statut fiscal privilégié. Les étudiants internationaux, qui représentent près de 30 % de l’effectif, ont été visés par des annulations de visa, souvent sans préavis ni justification.

Cette offensive contre Harvard n’est pas isolée. Les plus prestigieux établissements du pays sont dans le viseur. Certains tentent de résister, d’autres se soumettent, comme Columbia, qui a déjà accepté les exigences de l’administration Trump : « mise sous tutelle » de certains départements jugés sensibles – études sur le Moyen-Orient, l’Afrique ou encore l’Asie du Sud -, création d’un nouveau service d’ordre interne habilité à interpeller ou expulser toute personne jugée « perturbatrice » sur le campus. Une reddition présentée comme un compromis, mais imposée sous menace de perdre 400 millions de dollars de subventions fédérales.

Les motifs avancés pour justifier cette offensive contre le monde universitaire ? Sa prétendue passivité face à l’antisémitisme, ou sa tolérance jugée excessive à l’égard de certains groupes pro-palestiniens. Mais pour de nombreux observateurs, ces accusations relèvent d’abord d’une stratégie plus large : détourner la lutte contre l’antisémitisme – cause on ne peut plus légitime – pour mieux encadrer la parole publique, restreindre le pluralisme intellectuel et imposer un cadre doctrinal aligné sur les orientations du pouvoir.

La fin du système multilatéral

Ce n’est pas un hasard si l’une des principales instigatrices de cette campagne est Susie Wiles, stratège politique déjà à l’origine de la croisade anti-« woke » menée en Floride par Ron DeSantis. Désormais secrétaire générale de la Maison-Blanche, elle contribue à piloter cette guerre culturelle à l’échelle nationale. Une offensive qui a déjà conduit, dans plusieurs universités, à l’effacement de pans entiers de l’enseignement supérieur : théorie du genre, théorie critique de la race, et autres studies jugées déviantes ou subversives. Elle incarne une mouvance issue de la droite religieuse, où se mêlent puritanisme moral, autoritarisme revendiqué et volonté de redéfinir les normes sociales et académiques.

À l’international aussi, la ligne est claire : détricoter le système multilatéral issu de 1945 au profit d’un modèle bilatéral fondé sur le rapport de force, dans un esprit résolument XIXᵉ siècle. Lorsque Donald Trump a évoqué l’annexion, par la force, d’une partie du Groenland – autrement dit, la revendication territoriale d’un membre fondateur de l’OTAN sur un autre État membre -, il a porté le coup de grâce non seulement à l’esprit de l’Alliance atlantique, mais aussi au système multilatéral dans son ensemble.

Sur le front économique, la méthode reste la même : brutalité assumée et stratégie opportuniste. Le 2 avril, Trump annonce des droits de douane massifs sur une large part des importations, faisant plonger les marchés. Quelques jours plus tard, il suspend ces mesures pour trois mois – sauf pour la Chine – provoquant un rebond. Entre-temps, il publie sur Truth Social : « C’est le moment d’acheter !!! DJT ». De quoi susciter des soupçons de manipulation boursière. Des élus démocrates, qui semblent enfin se réveiller, dont Adam Schiff et Elizabeth Warren, ont demandé à la SEC, régulateur des marchés financiers, d’ouvrir une enquête. Il faut dire que Trump Media & Technology Group, l’une de ses sociétés, a bondi de 21,67 % en Bourse.

Imposer une nouvelle réalité politique et culturelle

Le projet trumpien – qui, faut-il le rappeler, n’est pas celui d’un homme seul, mais d’un courant politique structuré : une droite résolue, que certains n’hésitent pas à qualifier de crypto-fasciste, bien décidée à s’installer dans la durée – s’inscrit dans une dynamique historique amorcée il y a plusieurs décennies. Son objectif : imposer une nouvelle réalité politique et culturelle, où la dissidence est marginalisée et les institutions mises au service d’un pouvoir centralisé et autoritaire. Les universités ne sont qu’une des premières cibles. Elles ne seront pas les dernières.

Ceux qui prétendent que tout cela n’est que passager sont, pour beaucoup, les mêmes qui affirmaient en 2016 que Donald Trump ne serait jamais élu. Ceux qui, après le 6 janvier 2021, assuraient que l’homme ayant appelé ses partisans à marcher sur le Congrès – la seule tentative sérieuse de coup d’État de l’histoire américaine – finirait en prison et ne pourrait plus jamais se présenter à une élection. Ce sont encore ceux qui, il y a quelques mois à peine, étaient convaincus qu’il ne remettrait jamais les pieds à la Maison-Blanche.

Bien sûr, la révolution trumpienne n’a ni l’ampleur ni la radicalité de la révolution bolchevique, qui, dans un tout autre registre, inspira au journaliste américain John Reed le livre Dix jours qui ébranlèrent le monde – dont le titre a inspiré celui de cette tribune. Mais il faut bien reconnaître qu’en à peine cent jours, le pays de l’Oncle Sam, comme le monde, ont été ébranlés. Et si l’on est encore loin d’une dictature à la Poutine, force est d’admettre que les États-Unis ressemblent désormais davantage à la Hongrie de Viktor Orbán qu’à l’Amérique d’Obama ou de Kennedy.

À propos de l’auteur : Romuald Sciora, essayiste franco-américain et directeur de l’Observatoire politique et géostratégique des États-Unis de l’IRIS, est l’auteur de L’Amérique éclatée, paru chez Armand Colin.

Les tribunes publiées par French Morning sont proposées par des personnes extérieures à la rédaction, sur des sujets transatlantiques variés, afin d’alimenter le débat d’idées. La tribune n’étant pas signée par la rédaction, elle ne reflète pas la position de French Morning. Si vous souhaitez contribuer et proposer un texte, merci de nous contacter à l’adresse suivante : [email protected]

Django à Gogo 2025 : le jazz manouche rayonne à New York et dans le New Jersey

Créé par le guitariste franco-américain Stéphane Wrembel, Django à Gogo est un hommage vivant à l’héritage du génie du jazz manouche, Django Reinhardt. Chaque année, l’événement réunit musiciens de renommée internationale et jeunes talents autour de concerts et d’ateliers qui font vibrer les États-Unis au son du swing gitan.

Le point d’orgue de cette édition 2025 sera le grand concert du vendredi 9 mai (8pm) au Peter Jay Sharp Theatre de Symphony Space, à New York (billets ici). Sur scène, Stéphane Wrembel sera entouré notamment de Mozes Rosenberg, Antoine Boyer, Simba Baumgartner (arrière-petit-fils de Django Reinhardt) ou encore Yeore Kim, dans une formation transatlantique exceptionnelle.

En amont, un camp de guitare se tiendra du mardi 6 au dimanche 11 mai à Maplewood (New Jersey), avec des concerts plus intimistes, dont une soirée le 8 mai consacrée au jeune guitariste Sam Farthing (informations ici). La tournée se conclura le 11 mai (6pm) par une jam session à Brooklyn, au club Barbès.

La cheffe Alexia Duchêne ouvre Le Chêne à West Village

« On veut être les pionniers d’une nouvelle cuisine française à New York. Renouveler le genre et marquer l’histoire de la gastronomie française. » Quand elle parle de son projet, Alexia Duchêne ne fait pas dans la fausse modestie. La jeune femme, à peine 29 ans, assume ses ambitions. Leurs ambitions. « On », c’est elle et son mari, Ronan Le May. Elle en cuisine, lui en salle et en charge de la carte des vins. Tous les deux s’apprêtent à ouvrir Le Chêne au cœur de West Village, un restaurant bien ancré dans ses intentions gauloises mais loin des clichés sur notre gastronomie...

Subversive et lumineuse, Ruth Asawa enfin consacrée au SFMOMA

À San Francisco, elle est une icône. Ailleurs, on la découvre encore. Longtemps restée dans l’ombre de ses contemporains, Ruth Asawa (1926–2013) accède enfin à la reconnaissance internationale avec l’exposition événement : « Ruth Asawa : A Retrospective, au SFMOMA », jusqu’au mardi 2 septembre. Aujourd’hui hissée au rang des maîtres de l’art moderne américain, cette femme d’1,50 mètre a, d’un simple fil de fer, réinventé les codes de la sculpture contemporaine. Célèbre pour ses dentelles métalliques tridimensionnelles, ses formes organiques et ses architectures flottantes éthérées, Ruth Asawa défie les lois de la gravité et trouble la perception.

Une artiste discrète et révolutionnaire

Avec « Ruth Asawa : A Retrospective », le SFMOMA célèbre l’artiste de San Francisco à travers plus de 300 œuvres – sculptures en fil de fer bouclé, dessins, photographies, installations et archives personnelles – retraçant le parcours d’une artiste à la fois discrète et révolutionnaire. Coup d’éclat, moment de grâce : cette rétrospective dévoile ses créations les plus audacieuses et esquisse un portrait en apesanteur d’une artiste insaisissable, intensément moderne, porté par une scénographie suspendue entre ombre et lumière.

« Nous avons été attirés par l’expérimentation sans fin et la dimension collaborative de son travail, à travers une grande diversité de médiums. Bien qu’elle soit surtout connue pour ses sculptures en fil métallique, la rétrospective insiste sur l’interconnexion de ses pratiques : sculpture, dessin, gravure, mais aussi son engagement pour l’éducation artistique et les commandes publiques » explique Marin Sarvé-Tarr, conservatrice adjointe au SFMOMA.

Son œuvre, prolifique et visionnaire, déployée sur six décennies, dépasse les frontières de l’abstraction. Sculptrice, peintre et graveuse, Ruth Asawa redéfinit la sculpture avec des formes aériennes, à la fois organiques et géométriques. Flottant dans l’espace, ses œuvres transcendent la matière. En élevant les matériaux les plus modestes au rang d’art, elle tisse des liens subtils entre espace, matière et vivant.

Dans cet univers poétique, chaque forme trouve son équilibre, l’ordinaire devient extraordinaire. « Asawa utilisait non seulement différents métaux dans ses sculptures en fils, parfois plusieurs dans une même œuvre, pour créer des effets visuels contrastés, mais elle intégrait aussi de nouveaux matériaux comme l’argile, la galvanoplastie, la fonte de bronze, ou encore des marqueurs à pointe feutre issus de la signalétique commerciale », détaille Marin Sarvé-Tarr. Une approche libre et intuitive, moderne et intime.

Internée dans un camp durant la Seconde Guerre Mondiale

L’exposition suit un parcours à la fois chronologique et thématique, retraçant l’évolution de son style et des influences qui ont façonné son œuvre. Du Black Mountain College – aux côtés de Josef Albers, Buckminster Fuller ou Max Dehn – jusqu’à son installation à San Francisco, la rétrospective met en lumière son ancrage local et son rayonnement international. Elle souligne aussi son rôle essentiel dans la défense des arts et l’éducation créative.

Née en Californie en 1926 de parents immigrés japonais, Ruth Asawa grandit dans une ferme. Très tôt, elle trouve un exutoire dans le dessin. Son enfance est marquée par la ségrégation : durant la Seconde Guerre mondiale, elle et sa famille sont internées dans un camp. Une épreuve fondatrice qui nourrira durablement son regard artistique et son engagement communautaire. « La rétrospective se concentre sur la manière dont Asawa évoquait elle-même son internement pendant la guerre, notamment dans son “Japanese American Internment Memorial” de 1994 à San José, qu’elle décrivait comme “ma façon de raconter ma vie en bronze” », souligne la conservatrice.

En 1946, elle rejoint le Black Mountain College, en Caroline du Nord. Elle y développe une compréhension intuitive du mouvement, qui infusera son travail sculptural. En 1947, un voyage au Mexique et la découverte de la vannerie inspirent ses formes abstraites en fils métalliques. Symboles de continuité et d’interconnexion, ses créations entrelacées explorent l’espace, le plein et le vide, la lumière et l’ombre.

San Francisco, terre d’ancrage

Installée à San Francisco dès 1949, Ruth Asawa transforme sa maison-atelier familiale de Noe Valley en sanctuaire aérien, peuplé de créatures suspendues. Ville d’adoption pendant plus de soixante ans, San Francisco porte encore son empreinte. Ses sculptures publiques, issues d’initiatives communautaires, jalonnent le paysage urbain – de Ghirardelli Square à l’Embarcadero.

L’exposition met aussi en lumière son engagement pour l’accès à l’art et la sculpture publique. « Deux galeries de l’exposition sont consacrées à ses commandes publiques et à son plaidoyer pour les arts à San Francisco », indique Marin Sarvé-Tarr. On y découvre aussi les archives de la création de l’école publique artistique qui porte aujourd’hui son nom.

Une reconnaissance tardive, mais éclatante

Pourquoi une reconnaissance si tardive ? Longtemps ignorée, mère de six enfants, souvent réduite au rang d’artisane, Ruth Asawa revient aujourd’hui sur le devant de la scène. Son audace fait écho à celle d’Eva Hesse, Louise Bourgeois ou Yayoi Kusama. À la croisée de l’art, de l’artisanat et de l’architecture, elle invente un langage visuel unique.

« La rétrospective met en lumière toutes les manières dont son œuvre a façonné l’histoire de l’art américain », résume la commissaire. Si elle a longtemps collaboré avec le SFMOMA, Ruth Asawa avait déjà séduit les cercles influents dans les années 1950 : le MoMA, Philip Johnson, Mary Rockefeller… Représentée par la galerie Peridot à New York jusqu’en 1960, elle disparaît ensuite de la scène côtière Est.

Ruth Asawa: A Retrospective View, San Francisco Museum of Art (SFMOMA), 1973. © Laurence Cuneo. Portrait de Ruth Asawa, 1954. ©Nat Farbman/The LIFE Picture Collection/Shutterstock ; ©2025 Ruth Asawa Lanier, Inc., courtesy of David Zwirner.

Aujourd’hui, le monde de l’art célèbre enfin Ruth Asawa pour ce qu’elle fût : une pionnière. Son influence s’étend bien au-delà de San Francisco. Son nom figure désormais dans les grandes expositions collectives, aux côtés d’Anni Albers, Sheila Hicks ou Louise Bourgeois. « Un artiste n’a rien de spécial, disait-elle. Il peut simplement prendre des choses ordinaires et les rendre spéciales. » Une philosophie qui résonne toujours, confirmant l’artiste comme une maîtresse de l’art américain du XXᵉ siècle.

« De ses premières pièces au Black Mountain College à ses dessins floraux tardifs, nous espérons que les visiteurs repartiront avec une vision plus complète d’une œuvre rigoureuse et généreuse », conclut Marin Sarvé-Tarr. Après San Francisco, l’exposition poursuivra sa route vers le MoMA à New York, le Guggenheim Bilbao, en Espagne, et la Fondation Beyeler, en Suisse. Avec Ruth Asawa, exploratrice éternelle, la boucle n’est jamais totalement bouclée : elle ne fait que commencer.



À la veille des obsèques du pape François, l’émotion des catholiques francophones aux États-Unis

Dans l’église Saint Sebastian de Los Angeles, une photographie du pape François a été installée, encadrée par le drapeau du Vatican et celui des États-Unis, et floquée d’une bande noire, « pour manifester notre deuil », indique le Père German Sanchez. Pour ce Colombien, aumônier depuis 20 ans de la communauté francophone de LA, l’annonce de la mort du chef de l’Eglise catholique, lundi 21 avril à l’âge de 88 ans, s’est accompagnée de tristesse, mais surtout d’un sentiment « d’action de grâce ». Gratitude pour son départ sans souffrance, le lendemain de Pâques, et gratitude pour sa mission, remplie « jusqu’au dernier jour », qui a « marqué profondément l’Église et le monde ».

Toute la semaine, la mémoire du pape était au cœur des messes célébrées dans les églises catholiques d’un bout à l’autre du pays, qui abrite la quatrième communauté catholique au monde. Elle le sera encore ce week-end, alors que des milliers de pèlerins et de chefs d’État sont attendus à Rome, ce samedi 26 avril, pour les obsèques du pape. À Los Angeles où la communauté catholique compte de nombreux hispaniques et des personnes originaires du monde entier, le pape François était « très aimé », souligne le Père German Sanchez. « C’était un homme très humain, qui a su toucher le cœur de beaucoup d’hommes et de femmes, même non-croyants, rappelle-t-il. Il était proche des pauvres, de ceux qui souffrent, qui se sentent oubliés ou méprisés dans la société.»

Un pape qui a secoué l’épiscopat américain

Lui-même a été profondément marqué par le pape jésuite qu’il a rencontré plusieurs fois au cours des 12 ans de son pontificat : « Il n’était pas un “super-pape”, mais avant tout un homme, chargé d’une mission énorme, qui avait demandé avec humilité, dès sa première apparition : “Priez pour moi”». Lors de la visite du pape François aux États-Unis en 2015, le Père German Sanchez avait participé à une rencontre à Washington avec un groupe de paroissiens de Los Angeles. À Philadelphie, le pape François avait secoué l’épiscopat américain, en l’invitant à « descendre de son piédestal pour se mettre au service de son peuple », se remémore le prêtre. Il avait aussi délivré un message neuf sur la famille, en invitant l’Église à « ouvrir la porte, aux divorcés-remariés, aux homosexuels, à tous ceux qui frappent à sa porte » poursuit-il.

Mais c’est sa rencontre en petit comité avec le pape, en octobre 2022 à Rome, qui l’a le plus marqué, par l’intensité de sa « présence ». L’évêque de Rome recevait alors un groupe d’une soixantaine de représentants des aumôneries francophones du monde entier, qu’il a pris le temps de saluer un par un. Michèle Cassidy, qui vit à Los Angeles depuis 1968, faisait partie de la délégation. « C’était un grand privilège d’être un tout petit groupe dans une salle du Vatican, où le Saint Père est venu en marchant difficilement, se souvient-elle. Il souffrait beaucoup de ses genoux, et marchait sans aide, avec une canne. Mon mari et moi, nous lui avons parlé en espagnol. J’ai le souvenir de sa douceur, de sa gentillesse, il a pris le temps de nous écouter. »

L’humanité du pape, c’est ce qui a ramené vers l’Église Amélie, 43 ans, maman divorcée de 3 enfants, qui vit depuis 20 ans à Oakland, dans la baie de San Francisco. « Je me suis éloignée de l’Église au moment de mon divorce, et je m’en suis rapprochée en grande partie grâce au pape et à son message beaucoup plus accueillant vis-à-vis des divorcés que les papes précédents, témoigne la Française. En tant que maman, c’est ce message d’amour, de pardon, d’ouverture vers les autres que je veux transmettre à mes enfants » Une fois par mois, elle aime se rendre à une petite messe dans sa langue natale, à l’église Saint Charles d’Oakland prêtée par la paroisse américaine, où se retrouvent huit familles francophones aux origines très diverses, autour du Père Didier Cimalamungo, un jésuite originaire de République démocratique du Congo.

Le jeune prêtre, qui étudie actuellement la théologie à l’Université jésuite Santa Clara de Berkeley, a rencontré le pape François sept fois, y compris en République Démocratique du Congo, où le souverain pontife s’était rendu en 2023. «⁠⁠⁠ C’est une personne qui a vécu parmi nous, entre nous et avec nous » remercie le Père Didier Cimalamungo. Du pape, il ne retient pas tant ses discours «⁠⁠⁠ ciselés » que ses engouragements paternels, prodigués hors caméras, comme cette phrase : «⁠⁠⁠ Supportez-vous dans votre vulnérabilité ». Il conservera «⁠⁠⁠ comme une relique » un autographe qu’il avait demandé au pape à la fin d’une audience.

Le pape de l’écologie

Marguerite Higby, 32 ans, vit à Washington avec son mari américain et leurs deux petites filles de 2 ans et demi et 6 mois. La petite dernière a été baptisée dimanche dernier, jour de Pâques, à Saint-Louis de France, une « petite paroisse dynamique » où ils aiment retrouver des francophones pour la messe le dimanche. Pour la jeune femme « de sensibilité jésuite », le pape François a été à l’origine de sa prise de conscience écolo, en 2015, avec son encyclique verte Laudato Si. « Avant d’avoir lu “Laudato Si”, pour moi, l’environnement, c’était un sujet pour les bobo-écolos, et tout à coup, j’ai compris le lien entre prendre soin de la terre et prendre soin de ses habitants. Ça a été un moment assez fondateur » insiste–t-elle, citant aussi le film « Demain », de Cyril Dion.

L’encyclique Laudato Si, publiée en 2015, a provoqué un sursaut planétaire mondial dans la prise de conscience écologique. © YAY_images/DepositPhotos

L’appel du pape à plus de sobriété l’a poussée à changer son mode de vie, y compris aux États-Unis, un pays qu’elle trouve « en retard » par rapport à la France sur le sujet. Marguerite et son mari ont ainsi choisi d’acheter une maison plus petite en centre-ville de Washington, afin de déposer leurs enfants à la crèche en vélo-cargo électrique le matin (au lieu de vivre en banlieue avec deux voitures), de réduire leur consommation de viande, et de limiter leurs vols en avion à un aller-retour par an en France. 

Suivre les obsèques « en communion » avec Rome

Comme beaucoup de catholiques, elle espère l’élection d’un futur pape dans la lignée du pape François. « J’espère que le prochain pape continuera ce qu’il a commencé » se projette Marguerite. Même souhait pour Amélie, qui redoute, dans le contexte du retour au pouvoir fracassant de Donald Trump, l’arrivée d’un pape « conservateur. » « Je ressens de la crainte, car on a Trump qui amène beaucoup d’énergie négative, à l’opposé du pape, qui était dans l’humilité, la gentillesse, le pardon » glisse-t-elle. 

S’il sera difficile de suivre l’événement en direct en raison du décalage horaire, les catholiques francophones des États-Unis vont s’associer, par la prière et grâce aux médias, aux obsèques du pape François, ce samedi 26 avril à 9h45 am heure locale, sur le parvis de la Basilique Saint-Pierre à Rome. Dans le Westchester, au Nord de New-York, Cécile Boucquillon a prévu de suivre la célébration en différé grâce aux chaînes de télévision françaises. « C’est un pape qui a remis l’Eglise à la place qu’elle doit occuper, pour moi, au milieu des pauvres, en donnant l’exemple lui-même l’exemple » souligne-t-elle. Membre de la dynamique paroisse francophone de Saint John and Paul de Larchmont, rattachée à l’école américaine du même nom, elle ne se sent pas seule, dans ce moment de deuil et de changement pour l’Église.

À Los Angeles, le Père German Sanchez veillera tard durant la nuit pour vivre en direct les funérailles du pape François, « en communion » avec Rome en ce jour spécial, qui sera aussi celui de son anniversaire.

« Le bois dont je suis fait », la famille en héritage au TLF

Pour clore une saison encore une fois riche en émotions et en découvertes artistiques, le Théâtre du Lycée français présentera le vendredi 16 mai « Le bois dont je suis fait », une pièce sur la famille et le poids de son héritage. À l’aube de sa vie, une mère prend une décision cruciale : réunir son mari et ses deux fils dans l’espoir d’une réconciliation. Mais entre le poids du passé, les désirs d’indépendance et les secrets enfouis, cette réunion de famille risque de raviver de vieilles blessures.

Mise en scène par Clotilde Daniault et interprétée avec brio par Julien Cigana et Nicolas Devort, cette comédie sociale explore avec finesse l’héritage familial, ce que nous portons tous et dont il est si difficile de se défaire. Sur scène, deux talentueux comédiens incarnent une galerie de personnages attachants et hauts en couleurs, nous entraînant dans un tourbillon d’émotions. Grâce à un jeu subtil de postures, de regards et d’inflexions de voix, ils donnent vie à sept membres de la famille Lachassette, une famille de la classe moyenne ayant quitté Albi pour Lyon. Chacun pourra se reconnaître dans cette histoire universelle où les tentatives de trouver sa place au sein de la famille résonnent avec nos propres expériences.

Walk your shame out : Adeline Townsley donne une voix aux victimes d’abus sexuels

Un sweat-shirt noir, avec écrit en lettres vertes « Walk your shame out ». Adeline Townsley l’arbore fièrement, prête à répondre aux questions que cet appel à l’action peut susciter. Il y a deux ans, cette Française, installée à San Francisco depuis 2018, a décidé de lever le tabou sur l’agression sexuelle dont elle a été la victime lorsqu’elle était enfant, en lançant ce projet.

« Cette agression s’est passée quand j’avais sept ans, raconte-t-elle. J’ai été prise en charge, mais il n’y a pas eu de plainte déposée. Le silence s’est alors imposé, jusqu’à ce que j’arrive à un point où il fallait que ça sorte… » Adeline Townsley décide alors de faire fabriquer un sweat-shirt sur lequel on peut lire « Childhood sexual abuse survivor » (NDLR – « Survivante d’agression sexuelle subie pendant l’enfance »). « Je voyais bien les regards gênés quand je le portais dans la rue, et le silence qui continuait à s’imposer. J’ai alors fait faire un autre sweat-shirt, avec un message plus en douceur, qui serait mieux accepté par la société. Je le porte souvent, je vois les regards, et j’espère que les gens sont curieux et vont sur le site pour en savoir plus. »

Aider à sortir du silence

Première démarche de Walk your shame out, offrir un sweat-shirt aux victimes d’abus sexuels. « L’idée m’est venue quand j’ai fait faire les premiers exemplaires, car il fallait en commander au moins six. Ce premier geste peut aider à sortir de son inconfort et de son silence, dont profitent les agresseurs quand on ne les brise pas. » La jeune femme encourage les victimes à porter leur sweat-shirt en public, et de se joindre à elle à San Francisco pour une promenade qui permet d’évacuer la honte que beaucoup ressentent et créer ainsi des liens. « Grâce aux dons que mon association a déjà récoltés, j’ai pu commander une trentaine de sweat-shirts, et rencontrer d’autres victimes. Quand elles acceptent de se livrer, on retrouve beaucoup de similitudes entre les histoires. »

Au delà du message imprimé sur le sweat-shirt et de la main tendue que représente le fait de l’offrir, Walk your shame out est à présent une organisation à but non lucratif qui endosse également un rôle de conseil « afin de venir en aide aux autres ». Adeline Townsley espère que ces témoignages et ces conseils pourront autant prévenir que guérir. Sur le site de l’organisation, les victimes d’abus sexuels peuvent laisser leurs témoignages, partager des recommandations et des références de lecture ou de sites à consulter. À terme, Walk your shame out pourrait devenir une référence pour éviter la perpétration d’abus sexuels.

Être entendu pour briser le tabou

Par ailleurs, en tant que maman de deux enfants, Adeline Townsley souligne que les parents ont un énorme rôle à jouer : « C’est important d’établir des règles sur l’intimité et la nudité avec son partenaire, ses enfants et les personnes en contact avec les enfants, y compris les grands-parents. On montre ainsi à l’enfant qu’il est protégé. On peut aussi avoir des discussions autour de la notion de secret : un adulte ne devrait jamais demander à un enfant de cacher quelque chose à ses parents. »

Malgré une libération de la parole et un meilleur système de soutien aux enfants victimes d’abus sexuels, Adeline Townsley reconnaît toujours ressentir une énorme gêne quand elle aborde le sujet. « On veut être écouté et, pourtant, les personnes à qui l’on parle essaient de changer de sujet car elles sont elles-mêmes gênées. Une oreille attentive, un hug, ou simplement dire merci d’avoir partagé cela avec moi, ou me demander comment ça va, cela permet aux victimes de passer outre la honte qu’elles ressentent, et de briser ce silence. C’est une étape très importante, qui permet de regagner notre fierté. »

La pièce de théâtre « Le petit Chaperon Rouge » à l’Alliance New York

Avec « Le petit Chaperon Rouge (Little Red Riding Hood) », programmé par l’Alliance New York, le vendredi 30 mai (en français avec sous-titres en anglais) et le samedi 31 mai (en anglais), la compagnie parisienne Das Plateau réinterprète le conte des frères Grimm et permet à la petit fille d’échapper au loup et de conquérir sa propre liberté.

« Le Petit Chaperon Rouge ». ©Simon Gosselin

Crée en 2022 à Avignon, la pièce tout public prend aussi ses distances avec la version de Charles Perrault, traditionnellement lue aux enfants, où la petite fille et la grand-mère étaient dévorées par le loup. Dans l’interprétation de la compagnie française, fondée en 2008, les deux figures féminines sont sauvées par un chasseur et reviennent dans la forêt piéger le loup. Le spectacle déploie donc toute la densité du conte, sa gravité. Le sujet de l’agression et celui de la mort y sont développés mais ils amènent à une fin joyeuse où la résilience est au rendez-vous. 

« Le Petit Chaperon Rouge ». ©Simon Gosselin

La scénographie de James Brandily joue sur la multiplication de l’espace. Des jeux de miroirs – en réalité des reflets utilisant la technique du pepper ghost pour créer l’illusion d’un paysage, féérique et inquiétant – se superposent à des projections vidéo et même aux acteurs eux-mêmes. Les ficelles sont intentionnellement visibles n’altérant pas la magie de la représentation. C’est, en quelque sorte, un spectateur consentant, apte à se prémunir des dangers, qui se promène dans les bois pendant que le loup n’y est pas…

« Le Petit Chaperon Rouge ». ©Simon Gosselin

Alain Mabanckou, parrain de la French and Francophone cultural fair au Lycée Français

C’est un rendez-vous que les amoureux de la culture et de la langue françaises ne manqueront pas, ce samedi 26 avril : la 4e édition de la French and Francophone cultural fair au Centre culturel du Lycée Français. Une fête consacrée à la francophonie dans toute sa diversité avec, pour invité d’honneur cette année, l’écrivain et poète franco-congolais Alain Mabanckou.

Intitulée « En Français, Oui But Why ? », la journée sera marquée par des rencontres entre francophones et francophiles, des discussions avec des auteurs – séances de signature prévues – et traducteurs, des ateliers pour les enfants, un spectacle musical et du théâtre. Sans oublier des parties de pétanque !

Les portes ouvriront à 9:30am avec un petit-déjeuner et les mots d’accueil de Mohamed Bouabdallah, le conseiller culturel de l’Ambassade de France aux Etats-Unis, Directeur de Villa Albertine, ainsi que du chef d’établissement du Lycée Jérémie Bourdon. La première table ronde se tiendra de 10:40am à 11:40am (s’enregistrer ici) : « Le choix du français pour écrire » avec Alain Mabanckou et l’auteure canadienne d’origine vietnamienne Kim Thuy dont les romans explorent les thèmes de l’exil et de l’identité

La seconde, « La traduction à l’ère de l’intelligence artificielle » de 11:45an à 12:45pm (s’enregistrer ici), propose un débat hautement d’actualité avec la question de l’avenir du métier de traducteur à l’heure de l’IA. Seront invités pour en parler Lucie Tiberghien, directrice artistique de la compagnie Molière in the Park et elle-même traductrice littéraire, David Thépaut, un traducteur travaillant avec l’IA depuis plus de 10 ans, et Matt Reeck, traducteur et poète.

La troisième table ronde, de 1:30pm à 2:30pm, intéressera particulièrement parents et éducateurs : « Comment faire aimer la lecture aux enfants et aux adolescents ? » (s’enregistrer ici). L’écrivain Victor Dixen aura certainement quelques conseils à partager puisque ses romans jeunesse rencontrent un immense succès. L’illustratrice Marion Kadi parlera également du pouvoir de l’imagination pour susciter la passion des livres.

La journée s’achèvera par une représentation en français du Mariage de Figaro, interprétée par la troupe de L’Atelier Théâtre NY (billets ici).

L’accès à la journée évènement est gratuit mais l’inscription est obligatoire (s’inscrire ici). Les conférences et la représentation théâtrale sont payantes pour les adultes.

À la galerie Gagosian, des œuvres rares et tendres de Picasso, certaines exposées pour la première fois


Pour sa dernière exposition avant fermeture – rassurons-nous, les espaces du rez-de-chaussée seront conservés – la galerie Gagosian de Madison Avenue voit grand. Grand par le choix de la figure de Picasso, contestée mais néanmoins incontournable, et grand, par un choix d’œuvres rarement exposées, cinquante en tout, conçues entre 1896 et 1972. Une douzaine d’entre elles n’ayant d’ailleurs jamais été vues que dans l’atelier du maître. 

Ce sont les échanges nourris entre le fondateur de la galerie, Larry Gagosian, et la fille du peintre espagnol, Paloma Picasso, qui ont mené à l’exposition «⁠⁠⁠ Picasso : Tête-à-tête », visible jusqu’au jeudi 3 juillet, où les œuvres, peintures, sculptures et dessins, d’époques et de style différents, entament une conversation entre elles. Cette scénographie, étalée sur trois salles et deux étages, où l’on fait fi de la chronologie et d’une quelconque logique reliant les œuvres par leur technique, invite le spectateur à observer les connections qui s’opèrent entre elles. Ici, entre deux peintures de femmes allongées et une céramique, là entre un dessin, à la sanguine, d’un poupon potelé et celui, au crayon, d’une petite fille, en réalité Paloma, au regard de poupée…

Vue de l’exposition, « Enfant », 1921, œuvre exposée au public pour la première fois, et « Paloma » deux œuvres qui dialoguent, 1952. © M. Deslandes


Cette mise en scène protéiforme, nous la devons à l’artiste lui-même. En une sorte d’hommage, la galerie a pris modèle sur une exposition installée par Picasso lui-même, en 1932. Il accroche ses œuvres à la galerie George Petit, à Paris, pour ce qui sera sa première rétrospective personnelle. Quand on lui demande comment il va arranger cette exposition il répond : « Mal. Car une exposition, comme un tableau, bien ou mal « arrangée », cela revient au même. Ce qui compte, c’est l’esprit de suite des idées. »

Photo de l’accrochage de 1932, reproduite à la Gagosian, sur les murs de l’exposition. © M. Deslandes


Il fait alors le choix de juxtaposer les œuvres dans un éclectisme brillant. Son intention est limpide, son biographe John Richardson nous éclaire : « Le décalage était stratégique. Picasso voulait que son œuvre disparate soit perçue comme un tout organique et non pas découpée en “périodes” arbitraires par les critiques et les universitaires, sans son autorisation. » L’exposition d’aujourd’hui, refusant la chronologie, s’appuie donc sur la volonté de l’artiste de concevoir, au travers d’un ensemble d’œuvres, une œuvre ultime, mouvante, émouvante, riche des interactions entre ses éléments, mais aussi de ses interactions avec les visiteurs. L’artiste espagnol disait d’ailleurs : « Un tableau ne vit que par celui qui le regarde. »

Vue de l’exposition de 2025, à la Gagosian. ©M. Deslandes

Des images d’une grande douceur

Le dialogue peut donc commencer. Parcourir l’exposition procure un plaisir qui est difficilement avouable compte-tenu des sources historiques ayant révélé, ces dernières années, les violences faites aux femmes par l’artiste. Pourtant, quelle joie que ce tête-à-tête avec l’artiste, avec ces œuvres jamais vues ! On venait voir une énième exposition du monstre génial, on contemple des images d’une grande douceur. Les pièces exposées viennent en grande partie de la collection de sa fille. Ce qui explique sans doute pourquoi les thèmes qui y sont développés, touchant à l’enfance ou à la famille, sont « aimables ». Portraits de bambins, poupées, lecture, jeux, maternité, seules quelques toiles, sur le thème de la relation amoureuse, comme Baiser, Baiser II  ou Homme et femme nus, sont imprégnées de la violence amoureuse qui fait polémique dans l’œuvre (et dans la vie ?) de Picasso. 

« Enfant dans sa voiture », 1949 – « Fillette jouant avec une voiture (Paloma fond rouge) », 1951 – « Maternité sur fond blanc », 1953. © M. Deslandes – Gagosian 2025

Outre les peintures et petites sculptures évoquant l’enfance et les scènes d’amour féroces, quelques portraits de femmes contiennent une douceur infinie. On se plaît à contempler les couleurs claires, étonnamment délicates, développées par l’artiste. Comparées aux tons primaires des tableaux liés aux jeux d’enfants, ces teintes apparaissent paisibles, une sorte de volupté placide s’en dégage. 

Pablo Picasso, « Femme au béret bleu assise dans un fauteuil gris, manches rouges (Marie-Thérèse) », 1937 – « Femme au vase de houx, (Marie-Thérèse) », 1937. © 2025 Estate of Pablo Picasso / Artists Rights Society (ARS), New York Photo: Sandra Pointet Courtesy Gagosian
« Nu accoudé », 1961. © M. Deslandes – Estate of Pablo Picasso/Artists Rights Society (ARS)

On regrette le peu de matériel critique mis à disposition du visiteur, l’absence de cartel et d’explications des œuvres. Les plus curieux acquerront le catalogue illustré qui comprend une conversation entre Paloma Picasso et le peintre britannique Philippe Doig ainsi qu’une traduction anglaise de l’entretien entre le critique d’art Eric Tériade et Pablo Picasso, dans le journal « L’Intransigeant » du 15 juin 1932, dans lequel le peintre explique au chroniqueur sa volonté d’accrochage protéiforme.

Deux des œuvres exposées pour la première fois à la galerie Gagosian : « Portrait de femme au béret rouge (Marie-Thérèse) », 1937 – « Portrait de Femme (Marie-Thérèse) », 1936 – © 2025 Estate of Pablo Picasso / Artists Rights Society (ARS), New York Photo : Sandra Pointet Courtesy Gagosian

« Picasso : tête-à-tête », galerie Gagosian, 980 Madison Avenue. Jusqu’au jeudi 3 juillet.

« OVO » du Cirque du Soleil attendu dans trois villes texanes

Après une série de représentations estivales en Floride, « OVO » fera escale au Texas. Inspiré du monde des insectes, ce spectacle emblématique du Cirque du Soleil sera en tournée dans le Lone Star State cet automne : du jeudi 25 au dimanche 28 septembre au Frost Bank Center de San Antonio (billets ici), du jeudi 2 au dimanche 5 octobre au Toyota Center de Houston (billets ici), puis du jeudi 9 au dimanche 12 octobre au Moody Center d’Austin (billets ici).

Quinze ans après sa création, cette nouvelle version se veut plus contemporaine : décor repensé, numéros inédits, costumes revisités et bande-son entièrement réinventée. Déjà applaudi par plus de sept millions de spectateurs dans une quarantaine de pays, « OVO » reste fidèle à l’univers visuel et acrobatique qui a fait le succès de cette 25e production, conçue à l’origine pour marquer le quart de siècle de la compagnie québécoise.

Mis en scène par la chorégraphe brésilienne Deborah Colker, « OVO » – qui signifie « œuf » en portugais – plonge le public dans l’univers fascinant d’une colonie d’insectes grouillante de vie, portée par une cinquantaine d’acrobates et musiciens. Un écosystème vibrant où grillons bondissants, araignée contorsionniste et autres créatures virevoltent dans des tableaux mêlant performance physique et esthétique soignée.